Avatar

Olivier Zara

Consultant, conférencier & formateur en management

Quand vous prenez des décisions sur des sujets simples ou compliqués, votre décision devient obsolète quand l’objectif est atteint, quand la mission est réalisée. D’une certaine manière, vous programmez et contrôlez la date de l’obsolescence !

Quand vous prenez des décisions sur des sujets complexes, votre décision peut devenir obsolète avant même le début de son exécution et à tout moment ensuite. Un sujet est complexe quand personne ne sait avec certitude ce qu’il faut faire. La conception et la mise en œuvre des décisions nécessitent différentes expertises et impliquent différentes entités au sein d’une organisation. Il s’agit par exemple de la stratégie, du choix d’une innovation, du développement des ventes, de l’augmentation de la productivité ou d’une réorganisation. On parle souvent d’enjeux collectifs.

Quand vous prenez une décision sur la stratégie ou sur une réorganisation, il faudra attendre plusieurs mois pour savoir si vous avez pris la bonne décision. Il y a une part d’incertitude, d’imprévisibilité, d’instabilité liée à des facteurs internes et externes. De ce fait, une décision sur un sujet complexe a une obsolescence programmée… à une date que vous ne connaîtrez jamais. Selon votre secteur d’activités et le niveau de compétition, cette obsolescence sera plus ou moins rapide, mais tôt ou tard, il faudra de nouveau innover, se réorganiser et revoir la stratégie dans une boucle infinie. Il s’agit donc d’une obsolescence à la fois programmée et infinie de vos décisions passées !

Vos collaborateurs mettent en œuvre l’ensemble de vos décisions passées sur des sujets complexes. Ils sont donc aux premières loges pour mesurer le niveau d’obsolescence de chacune des décisions prises dans les derniers mois ou les dernières années. Ils ne sont pas seulement sur le terrain comme tout bon décideur : ils vivent le terrain.

Malheureusement, les structures hiérarchiques ne favorisent pas la liberté d’expression et donc la remontée d’informations sur le niveau d’obsolescence des décisions. Il s’agit des fameux filtres hiérarchiques. « Les mauvaises nouvelles sont fatales à celui qui les apporte », disait Shakespeare dans Antoine et Cléopâtre. Dans l’Antiquité, lorsqu’un monarque recevait de mauvaises nouvelles, sa réaction était parfois de tuer le porteur du message. De facto, celui qui affirme qu’une décision est obsolète est en train de critiquer la décision du chef. Il met immédiatement en danger sa carrière. Il va donc se taire.

Il y a bien pire qu’une mauvaise décision : la non-décision ou la décision tardive qui peuvent conduire à une crise. Très souvent, les filtres hiérarchiques vont donc laisser les décideurs dans l’ignorance totale sur le niveau d’obsolescence de leurs décisions… jusqu’à la crise.

Pour mesurer le niveau d’obsolescence de vos décisions passées sur des sujets complexes, vous devriez organiser un sondage régulièrement avec l’ensemble des parties prenantes de ce sujet : ceux qui vivent le terrain, sans tenir compte du diplôme, du statut, du pouvoir ou de l’ancienneté. Je vous recommande de le faire 1 à 3 fois par an selon votre secteur d’activités et le niveau de compétition. Ainsi, en quelques minutes l’ensemble des acteurs du terrain & des parties prenantes internes ou externes vous aideront à identifier les décisions obsolètes. Le sondage doit orienter les participants sur les enjeux collectifs, les défis futurs qui vont contribuer à une prospérité durable. Il ne s’agit pas d’un cahier des doléances sur le présent ou le passé. Ce n’est pas une enquête de climat social !

Pour protéger la liberté d’expression et la sécurité psychologique, éviter la peur de critiquer la décision du chef, vous devez garantir la confidentialité des réponses. Cela doit donc se faire à l’écrit et d’une manière anonyme. Pour chaque défi proposé, le répondant pourrait donner une liste des talents requis pour ce défi. Vous pourrez ainsi identifier les défis prioritaires, mais aussi les talents nécessaires pour relever chaque défi. Vous passerez plus rapidement de l’intention à l’action.

Après le sondage, vous devrez faire une analyse holistique et systémique des défis proposés : occurrences, interactions, impacts, etc. afin d’identifier les liens critiques entre les défis proposés.

Une fois que vous aurez identifié puis hiérarchisé les sujets, ce sera le temps de les traiter au plus près des 20 principes de l’excellence décisionnelle et en particulier avec une démarche de co-construction adaptée aux sujets complexes. La technique du Codev Stratégique permet de prototyper des projets de décision en réduisant au minimum les biais cognitifs. La durée des réunions peut être optimisée notamment grâce à la technique du Sprint Digital (tour de table à l’écrit).

Si vous pensez “nouveau”, vous risquez la décision tardive ou la non-décision. Si vous pensez “obsolète”, le nouveau arrivera juste à temps !

Une décision complexe devient tôt ou tard obsolète du fait de sa nature. Personne ne peut dire avec certitude quand cela arrivera.

Extraits du livre : L’excellence décisionnelle. Voir chapitre 4 du livre.

Partage cette page

Qu'en pensez-vous?